Catégorie : Energie

Cloud : l’énergie grise dans les terminaux

L’objectif de cette série d’articles est de répondre à une question simple : quel est le composant des nuages informatiques (cloud) qui concentre le plus d’énergie ?

Dans l’article précédent , nous avons (re)découvert que les centres informatiques ne sont pas les ogres énergivores tant décriés. Si on observe uniquement le réseau, c’est le dernier kilomètre* qui consomme le plus d’électricité sur la phase d’utilisation.

Dans cet article, nous ajoutons les deux autres composants du cloud – centres informatiques (data center) et internautes – dans l’équation.

Au moins 40 % de l’électricité consommée par les internautes

Dans le cloud, le nombre d’utilisateurs par serveur est très élevé. Google annonce par exemple 4 500 utilisateurs GMail par serveur. Le poids des utilisateurs dans le bilan électrique global du cloud est donc prépondérant, de l’ordre de 40 % au minimum selon nos estimations.

Ce qui corrobore l’analyse de Steven Lanzisera, du Laboratoire National Lawrence Berkeley, que nous citions dans la première partie de cet article : « La grande majorité de la consommation d’énergie se situe aux extrémités du réseau, dans les bureaux et les résidences, plutôt que dans les centres de données ».

Ne pas oublier l’énergie grise

En cycle de vie complet, c’est-à-dire en intégrant l’énergie grise (nécessaire à la fabrication des équipements et infrastructures), la mise à jour de notre  étude sur l’empreinte du web, publiée en 2015, montre que les internautes représentent environ 38 % du bilan énergétique contre 33 % pour les réseaux et 29 % pour les centres de données.

Une autre étude en cycle de vie complet, le Benchmark Numérique Responsable 2017 du Club Green IT, estime que le réseau représente 19 % du bilan énergétique global du système d’information d’une entreprise, devant ses centres informatiques (17 %), mais derrière les équipements des utilisateurs (25 %).

Comme il y a notablement plus d’utilisateurs par serveur dans le cloud public, ces deux ordres de grandeurs semblent raisonnables.

Pas la même énergie selon le tiers de l’architecture

Chaque tiers a son importance. Il y a beaucoup d’énergie grise du coté des internautes, d’où un bilan énergétique global nettement supérieur aux deux autres tiers, pour lesquels le gros de l’énergie est dépensée sur la phase d’utilisation.

Et la part du réseau augmente proportionnellement plus vite sur la phase d’utilisation que les autres tiers (internautes et centres informatiques). Notamment à cause de la 4G. A la fois parce que cette technologie nécessite 23 fois plus d’énergie qu’une connexion ADSL et parce que nos usages en situation de mobilité augmentent vite.

4 gestes clés pour progresser

Au final, les internautes concentrent à la fois la consommation électrique (phase d’utilisation), notamment à cause des box ADSL et des boîtiers TV associés, et l’énergie grise (phase de fabrication) du fait du nombre d’équipement et de leur durée de vie courte. Mais il ne faut pas négliger la consommation électrique (phase d’utilisation) du réseau et des centres informatiques.

Quatre gestes s’imposent pour réduire le bilan énergétique du cloud

  • Allonger la durée de vie de ses terminaux (smartphone, ordinateur, etc.) pour réduire l’énergie grise ;
  • Débrancher sa box ADSL dès que possible ;
  • Limiter les accès 3G / 4G ;
  • Eviter au maximum d’utiliser le réseau (donc le cloud).

Ce dernier geste, fondamental, est totalement opposé à la tendance actuelle qui consiste à généraliser le couple 4G + cloud (les deux modèles n’ayant pas d’avenir l’un sans l’autre, du moins sur le marché grand public). Notre analyse pose donc la question des usages du numérique : le cloud pour quoi faire ? Ce sera l’objet d’un troisième et dernier article de cette série.

* du DSLAM ADSL à l’ordinateur de l’internaute et de la station relais 3G / 4G (base station) jusqu’au smartphone du mobinaute.

Source : GreenIT.fr

Frédéric Bordage

Expert en green IT, sobriété numérique, numérique responsable, écoconception et slow.tech, j'ai créé le collectif Green IT en 2004. Je conseille des organisations privées et publiques, et anime GreenIT.fr, le Collectif Conception Numérique Responsable (@CNumR) et le Club Green IT.

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