Catégorie : Etude

Numérique au bureau : 27 % de notre forfait GES soutenable

Alors que la COP26 débute dans quelques jours à Glasgow et que le Sénat vote demain la proposition de loi REEN visant à “Réduire l’empreinte environnementale du numérique”, GreenIT.fr et ses partenaires publient les résultats de la 6ème édition du Benchmark Green IT. Ils constatent que les entreprises ne parviennent pas à réduire les émissions de gaz à effet de serre associées au numérique. Et que ces émissions représentent déjà 27 % du forfait GES soutenable d’un français.

Pilotée par GreenIT.fr et réalisée en collaboration avec le Club Green IT, Espelia et le Zero Emission Group (EPFL, Suisse), le Benchmark Green IT aide les entreprises privées et publiques et les collectivités territoriales à quantifier les impacts environnementaux de leurs systèmes d’informations et à identifier des solutions et bonnes pratiques à mettre en œuvre pour les réduire.

Cette étude de référence a lieu chaque année depuis 6 ans. En 2021, elle a porté sur :

  • 25 organisation privées et publiques, dont 7 collectivités territoriales ;
  • 356 000 utilisateurs ;
  • 1 000 000 d’équipements numériques.

Des impacts stables par rapport à l’année dernière

Les impacts environnementaux associés à l’empreinte numérique d’un utilisateur sont conséquents à l’échelle d’une année :

  • 18 000 MJ d’énergie primaire (2 écrans géants de 85 pouces allumés en permanence)
  • 460 kg équivalent CO2 de gaz à effet de serre (4 750 kms en voiture thermique récente)
  • 4 700 litres d’eau bleue (520 packs d’eau de 9 litres)
  • 6 500 kg de terre excavée (5 voitures de 1,3 tonne)

« Pour prendre la mesure de ce que ces chiffres signifient, il faut se rendre compte que les 460 kg équivalent CO2 par an et par utilisateur représentent 27 % de notre “forfait annuel soutenable [1] en termes d’émissions de gaz à effet de serre” » met en perspective Frédéric Bordage, pilote du projet au sein du collectif GreenIT.fr.

A l’échelle d’une journée au bureau (220 jours par an) cela correspond, chaque jour, à :

  • 80 MJ, soit 44 ampoules de 25 Watts allumées en permanence pendant 8 heures
  • 2 kg équivalent CO2 de gaz à effet de serre, soit 20 kilomètres en voiture thermique récente
  • 21 litres d’eau bleue, soit 2 packs d’eau minérale de 9 litres
  • 30 kg de terre excavée chaque jour

En termes d’évolution dans le temps, « malgré la généralisation de plus en plus fréquente du 2ème écran, les impacts sont stables par rapport à 2020 » constate Frédéric Bordage. « Cela signifie que les efforts faits dans d’autres domaines – impression, durée de vie, etc. – compensent à peine la généralisation de cette mauvaise pratique » commente Anne Rabot qui a accompagné de nombreuses entreprises dans le cadre du Club Green IT.

Impacts environnementaux quotidiens associés à l’usage du numérique en entreprise

Utilisateurs et service informatique (DSI) concentrent les impacts

Les impacts ont principalement lieu du côté :

  • des utilisateurs : 37 % de la consommation d’eau, 34 % de l’épuisement des ressources, 30 % du réchauffement global ;
  • du service informatique : 42 % de la consommation d’énergie primaire, 31 % du réchauffement global ;
  • du réseau et de la téléphonie : 31 % de l’épuisement des ressources, 23 % de la consommation d’eau et d’énergie primaire.

Vu sous l’angle des indicateurs environnementaux, les principaux contributeurs sont :

  • Epuisement de l’énergie primaire : DSI et prestataires (42 %) ;
  • Réchauffement global : DSI et prestataires (31 %) et utilisateurs (30 %) ;
  • Consommation d’eau : utilisateurs (37 %) ;
  • Epuisement des ressources abiotiques : utilisateurs (34 %), réseaux et téléphonie (31%) et centres informatiques (30 %).

Un premier tassement en matière de maturité

Après plusieurs années de progrès marqués, la montée en compétence des DSI plafonne autour de 45 % de maturité globale. Cette évaluation, basée sur le référentiel du Club Green IT, donne une idée de la capacité des organisations à mettre concrètement en œuvre la sobriété numérique.

Le niveau est homogène dans tous les domaines – impression, centre informatique, logiciels, etc. – avec 41 % à 42 % de maturité. Deux exceptions cependant : la durée de vie (55 %) qui est un sujet particulièrement travaillé et la gouvernance qui est un domaine particulièrement peu mature (30 %).

Trois axes d’amélioration notables

Après avoir compilé 25 plans d’actions individuels, il ressort que les 3 actions les plus efficaces pour réduire l’empreinte numérique d’un salarié sont :

  1. Réduire le taux d’équipement par collaborateur et notamment éviter le 2ème écran ;
  2. Allonger la durée de vie en systématisant le réemploi ;
  3. Réduire les kilomètres des collaborateurs DSI et prestataires en favorisant le télétravail et mettant en place un Plan de Mobilité (PDM).

« La plupart de ces bonnes pratiques sont simples, rapides, et peu coûteuses à mettre en œuvre » indique Amael Parreaux-Ey qui a piloté l’étude pour le Zero Emission Group (EPFL) en Suisse. « Le réemploi permet par exemple de réduire jusqu’à 20 % le bilan gaz à effet de serre du système d’information » complète Léo Donse, l’expert d’Espelia qui a accompagné les collectivités territoriales.

En parallèle, on peut également :

  • Améliorer la qualité des consommables et de l’électricité en privilégiant le papier recyclé labellisés FSC ou Blue Angel et l’électricité produire à partir d’hydraulique courant ;
  • Réduire les besoins en refroidissement de la salle informatique en déployant 100 % d’équipements conformes ASHRAE classe A3 pour pouvoir recourir au froid naturel (freecooling).

Retrouvez tous les résultats du Benchmark Green IT 2021, les rapports, infographies et synthèses ici : http://club.greenit.fr/benchmark2021.html

[1] pour rester dans la limite d’un réchauffement global de +1,5 ° Celsius. Si on fixe le seuil à aucun réchauffement, ces 460 kg eq. CO2 représentent plus de 50 % de notre forfait GES soutenable annuel.

Frédéric Bordage

Expert en green IT, sobriété numérique, numérique responsable, écoconception et slow.tech, j'ai créé le collectif Green IT en 2004. Je conseille des organisations privées et publiques, et anime GreenIT.fr, le Collectif Conception Numérique Responsable (@CNumR) et le Club Green IT.

Site web - Twitter - Facebook - Linked In