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Green IT : tentative de définition

[mis à jour le 6 juin 2009 pour tenir compte des commentaires]
[mis à jour le 24 juin 2009 pour tenir compte d’un nouveau lot de commentaires]

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Cet article a été mis à jour ici : http://greenit.fr/definition
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Le Green IT arrive à une première phase de maturité. Les acronymes se multiplient : Green ICT, Eco-TIC, Green IT 2.0, etc.. Après quelques centaines de billets publiés sur GreenIT.fr et des dizaines d’interviews avec les acteurs les plus représentatifs du Green IT, il me semble intéressant de vous proposer (enfin) une première définition du Green IT. Elle nous permettra de nous accorder sur un vocabulaire commun pour faciliter nos échanges.

J’ai forgé ces définitions en observant les faits concrets. Ce ne sont donc pas des définitions théoriques comme on peut en trouver dans les rapports du Gartner ou de Forrester, mais un constat de ce qui se passe sur le terrain. Merci de me donner votre avis en commentaire pour que nous aboutissions à une définition commune du vocabulaire du Green IT.

Green IT – Green IT 1.0 – Green for IT – Informatique éco-responsable – éco-TIC
L’ensemble des méthodes, logiciels, matériels, services et processus informatiques qui :
1. réduisent l’impact de l’informatique sur l’environnement par une démarche éco-responsable : éco-conception, économies d’énergie, gestion des déchets, etc.,
2. réduisent le budget de la DSI.
Exemple : virtualisation.

Green ICT – Green IT 1.5
ICT : Information & Communication Technologies. Traduit en français pour TIC (Technologies de l’Information et de la Communication). Extension du champ du Green IT 1.0 (informatique) aux outils de communication et aux réseaux. Il s’agit donc de réduire l’empreinte écologique des infrastructures de communication (réseaux, téléphonie, etc.) et d’utiliser ces outils pour réduire l’empreinte écologique de l’entreprise, notamment en réduisant les déplacements.
Exemple : télétravail, téléprésence

Dans ce premier périmètre on s’intéresse uniquement à l’informatique. Les approches sont essentiellement tournées vers l’optimisation de processus techniques existants et vers les économies d’énergie dans un but financier. C’est une démarche à court terme. L’impact positif sur l’environnement – réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) – n’est souvent qu’une heureuse conséquence, exploitée avec opportunisme par les directions marketing et les directions informatiques. La gestion des déchets électroniques (DEEE) n’est pas encore une réalité car, contrairement aux économies d’énergie, cette action coûte de l’argent à l’entreprise.

Green IT 1.0 et 1.5 ont le mérite d’exister ! Mais elles sont trop restrictives et trop “techno-centrées”. Sans modifier en même temps les usages des technologies, elles risquent d’être la source d’un “effet rebond” important : plus de PC eco-friendly (plus économes en énergie et plus facilement recyclables), consommeront au final plus d’énergie et produiront donc, globalement, plus de CO2 et de déchets (DEEE). L’impact écologique à priori positif s’avèrera négatif sur le long terme.

Green IT 2.0 – IT for Green
Réduction de l’empreinte environnementale de la société grâce aux TIC : utilisation des TIC pour réorganiser / optimiser des processus métiers en fonction de leur empreinte écologique grâce l’Analyse du Cycle de Vie (ACV). Pour l’instant (juin 2009), les entreprises s’intéressent plus à leur empreinte carbone qu’au reste des pollutions.

Le concept de “Green IT 2.0” émerge face au “syndrome des 2%” et grâce au rapport Smart 2020 qui estime que les TIC peuvent réduire les émissions de GES de l’humanité de 15%. On utilise ici l’outil informatique pour impacter le métier (processus, produits, services) de l’entreprise. La distinction entre les leviers métier (Green IT 2.0) et organisationnels (Green ICT / 1.5) est encore floue.
Exemple : green supply chain, réseaux physiques intelligents (smart grid)

Eco-TIC
Traduction française de Green IT. Cet acronyme est la concaténation de Ecologie et TIC. Le rapport TIC et Développement Durable du gouvernement a “officialisé” ce terme comme la traduction française de Green IT. Dans les faits, le terme Eco-TIC couvre un périmètre plus large que Green IT et Green ICT en englobant les technologies grand public telles que le matériel audio-visuel, les box internet, etc. Cet acronyme ne fait pas la différence entre la dimension métier (Green IT 2.0 – IT for Green) ou technique (Green IT 1.0 et 1.5 – Green for IT). Il englobe les deux approches.

Ces deux définitions – Green IT 2.0 et Eco-TIC – ajoutent aux précédentes (Green IT 1.0, 1.5) la dimension métier (Green IT 2.0) et l’engagement des entreprises à réduire leur empreinte environnementale sur le long terme. Mais elles s’intéressent finalement peu au progrès social et à l’engagement sociétal.

Fair IT
On peut traduire Fair IT par “informatique équitable”. Le Fair IT s’intéresse essentiellement aux conditions de travail des employés de l’industrie informatique, à l’éthique, et au respect des droits humains fondamentaux. C’est la dimension “responsabilité sociale et sociétale” (RSE) des acteurs du marché. La notion de Fair IT concerne essentiellement les fournisseurs de matériels et logiciels. Mais les utilisateurs influencent notablement les fournisseurs, notamment en demandant aux fournisseurs de s’engager sur le respect des droits de leurs employés et des employés de leurs sous-traitants. Exemple : rapport de Fair Computer.

En partant de ces constats, voilà la définition que je vous propose :

TIC durables (positives ?) – Sustainable IT
Les technologies de l’information et de la communication (TIC) durables sont constituées de l’ensemble des méthodes, logiciels, matériels, services, processus, et des usages faits de ces outils pour :

1. réduire l’impact des TIC sur l’environnement : participent à la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) responsables du réchauffement climatique et à la réduction des pollutions (notamment des déchets) responsables de l’écroulement de la biodiversité ;

2. améliorer les conditions de vie des citoyens et facilitent leur participation aux enjeux et à la gouvernance de la société ; améliore les conditions de travail des salariés (dans un esprit de respect et de valorisation des êtres humains) ;

3. aider les entreprises à s’inscrire dans et à gérer continuellement l’évolution du cadre réglementaire lié au développement durable (social, sociétal, environnemental). Par exemple, à moyen terme, la mise en place d’une double comptabilité carbone au sein du système d’information ;

4. faire émerger une économie positive / circulaire, basée sur des modèles économiques durables et respectueux de l’environnement et des êtres humains, afin d’assurer un développement durable de la société sur le long terme *.

Deux remarques :
– Dans cette définition, la notion de durabilité inclut celle de responsabilité sociale et sociétale sur le long terme. Contrairement au Green IT, les TIC durables englobent les trois piliers du développement durable : économie, environnement, et société / individus.
– Parmi les TIC durables, on peut toujours faire la distinction entre les démarches tournées vers les technologies en elles-même et les démarches tournées vers le métier de l’entreprise et la société civile.

* pour les initiés, je me réfère à la définition de l’économie positive de BeCitizen et aux approches décrites dans les livres Cradle to Cradle et Effondrement.

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Frédéric Bordage

Expert en green IT, sobriété numérique, numérique responsable, écoconception et slow.tech, j'ai créé le collectif Green IT en 2004. Je conseille des organisations privées et publiques, et anime GreenIT.fr, le Collectif Conception Numérique Responsable (@CNumR) et le Club Green IT.

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