Catégorie : idée

Mon week-end 2040, avec ou sans numérique ?

Grands-parents, enfants, parents, jeunes adultes… Lorraine de Montenay, Marion Josserand et Anne Faubry ont accueilli des participants aux profils variés pour imaginer ensemble quels usages numériques resteront (ou pas) en 2040 !

Que nous restera-t-il du numérique en 2040 ? Pourra-t-on encore avoir tous un smartphone dans la poche ? Quelles contraintes externes viendront limiter nos usages ? Et que voulons-nous garder du numérique ?

C’était l’objet des ateliers grand public que les associations Green IT et Designers Ethiques ont tenu tout le weekend du 18 et 19 novembre à la Cité des Sciences et de l’Industrie à l’occasion de l’événement “Tête à Tech” sur le thème “Slow-Tech”.

L’objectif de l’événement ? Questionner la technologie sous l’angle de la lenteur et des alternatives résilientes à la high-tech. Une occasion unique de faire se croiser au cœur de la Cité des Sciences et de l’Industrie des visiteurs, des escargots et des interlocuteurs tels que la Brigade du Temps qui donne des cours d’horlogerie, des ingénieurs de Centrale Nantes travaillant sur des solutions low tech, ou Cinécyclo, association de cinéma itinérant à vélo.

L’atelier

L’atelier Green IT / Designers Ethiques était installé juste à côté de l’exposition permanente Urgence Climatique – d’ailleurs, nous en avons profité pour aller la visiter, et elle est très bien faite !

L’objectif de notre atelier était de permettre aux visiteurs d’élargir leurs imaginaires concernant nos modes de vie, en particulier par rapport à l’usage omniprésent du numérique aujourd’hui et ses impacts environnementaux.

En effet, on dit souvent qu’il faut enrichir nos imaginaires collectifs, et c’est ce que fait par exemple la Fresque des Nouveaux Récits. Cependant nous avons encore peu d’occasions de nous y exercer spontanément.

C’était aussi l’occasion de se confronter à un public généraliste et familial, pas du tout sensibilisé aux impacts environnementaux du numérique.

L’atelier se déroulait en 3 temps :

  1. Sensibiliser : Tout d’abord lorsque l’on parle d’écologie, il est important d’avoir en tête quelques ordres de grandeur. En quoi le numérique n’est-il pas soutenable ? Où se situent ses impacts et quelles sont les projections pour 2030 et 2050 ?
    Les chiffres des études ADEME-ARCEP pour la France et de l’étude Europe présentés sur des posters permettaient de transmettre rapidement les idées clés via des devinettes aux participants, très à l’écoute dès cette première phase.

  1. Inspirer : Imaginer les futurs usages pour des personnes connaissant peu le sujet, cela peut être difficile : de quoi parler ? comment s’extraire des limites de ce qu’un individu peut faire tout seul ?

Les participants étaient invités à se projeter dans le salon de la famille Hamicha : sur les tables basses et les murs étaient disposés des indices. Ces indices permettaient aux participants de s’inspirer de solutions au-delà des gestes individuels : des solutions collectives dans le cadre d’une réduction du numérique appuyées sur le scénario Génération Frugale de l’ADEME : calendrier de partage des appareils avec les voisins, salle de vidéoprojection dans l’immeuble, atelier de réparation, initiatives potentielles de la société civiles et nouvelle loi rapportées dans le journal, …

Un moment réjouissant de partage et de découverte entre amis ou des parents avec leurs enfants !

  1. Se projeter : Les participants ont ensuite pris en main crayons et stylos pour imaginer entre eux et dessiner leur journée type d’un week-end en 2040. Qu’est-ce qui leur a fait envie ? Que conserver du numérique ? Quelles alternatives souhaitables ? On vous fait un résumé de leurs super idées ci-dessous.

Les résultats

Activités sans numérique

“Balade en forêt pour se reconnecter à la nature”

Alors que nous étions sur un public très francilien voire principalement parisien, les résultats étaient ou bien dans un imaginaire très proche de la nature, ou bien dans un environnement urbain. Parmi les participants, près de la moitié ont spontanément prévu dans leur journée de week-end en 2040 une balade en forêt, qu’elle soit en marchant, en courant ou à vélo.

Les participants ont mis l’accent sur des activités sans numérique qu’ils pratiquent déjà ou aimeraient pratiquer plus : balades et randonnées, sport, lecture, brocante, jardinage, peinture, tricot… en allant parfois jusqu’à se projeter dans le fait de vivre dans un éco-village où des journées communautaires sont dédiées à la récupération de matériaux et à la construction de bâtiments communs.

Ou encore : “Toiture terrasse sous forme de jardin collectif (potager, poules). On y récupère les œufs pour le petit-déj.”

En fait ce sont des activités qu’on peut déjà faire aujourd’hui, et sympa en plus, qui permettent d’entretenir vraiment les liens avec ses amis”, nous disait une des participante en sortant de l’atelier.

Un bémol, cependant : moins de numérique, c’est aussi parfois devoir supporter une charge mentale plus importante des tâches à effectuer, un potentiel d’accroissement de la charge insurmontable pour une mère débordée qui nous confiait vouloir faire plus d’efforts pour diminuer ses impacts environnementaux, mais ne pas avoir les ressources pour le faire. Une remarque qui nous permet de rappeler qu’il ne pourra y avoir de changement structurel sans une réelle prise en compte des besoins quotidiens et immédiats des personnes, et qu’il nous faut questionner aussi notre rapport au partage genré “des tâches” (ou aux soins à soi et aux autres si on change de perspective…).

Activités numériques : que reste-t-il ?

Parmi les activités numériques que l’on retrouve le plus, on note le film du soir en famille ou avec des amis, qui est clairement ressorti à plusieurs reprises… mais sur vidéoprojecteur plutôt que sur télévision. Les participants se sont ainsi à la fois emparés de deux notions abordées lors de la sensibilisation, concernant l’énorme impact environnemental des téléviseurs et les bénéfices de la mutualisation (un équipement pour plusieurs personnes), mais aussi d’un des indices présents dans la pièce. Un autre indice permettait d’avoir recours à une troupe de conteurs-interprètes, mais cet indice n’a été utilisé qu’une fois en 2 jours.

Les ateliers de réparation ont aussi suscité beaucoup d’intérêt, certains participants regrettant qu’on ne trouve pas d’atelier de réparation très facilement près de chez eux. Une idée pour organiser des repair-cafés plus souvent ?

Le fait d’être amené à réduire ses usages du numérique a aussi entraîné une discussion très intéressante avec un groupe de lycéennes, qui ont souligné qu’elles savaient largement mieux se distancier du numérique que leurs propres parents, les véritables “accros à l’écran”. Sujet de société…

Les inclassables

Promis, aucun indice ne permettait de présager que les participants nous décriraient ces idées :

On notera par exemple l’image d’Epinal du “réveil à la lumière du soleil ou au chant du coq”.

Encore plus original et quasi-broadwaylien : “des chanteurs·ses dans la rue remplacent les écouteurs pour la musique : air pods vivants !

Outre ces idées, on note la renaissance d’activités de notre passé récent comme : “faire des recherches à la bibliothèque et préparer un exposé sur poster papier pour l’université”.

Et pourquoi pas, de façon plus high-tech : “la buanderie de l’immeuble dispose de machines de sport et musculation dont l’énergie produite sert partiellement à faire tourner les machines à laver.”

Enfin, pour faire tout cela, beaucoup notent qu’un week-end de 2 jours, “c’est trop court”. La semaine de 4 jours a ses adeptes, afin d’avoir plus le temps de se déplacer lentement, de réparer, d’emprunter, mais aussi d’apprendre…

Conclusion

Le futur ne ressemblera probablement pas à ce que nous et les participants avions imaginé, du moins en partie, mais l’exercice a atteint son objectif d’imaginer d’autres perspectives.

Tous les participants sont repartis enthousiasmés par l’exercice. Enfin, même si nombreux sont ceux parmi les adultes qui sont inquiets pour l’avenir, certains participants sont plus enthousiastes, y compris parmi les plus jeunes comme ce garçon de 12 ans qui s’est exclamé en fin d’atelier : “2040 ça a l’air cool !

Maintenant que nous avons testé cette première version de l’atelier, il nous reste quelques ajustements à faire pour pouvoir vous proposer prochainement un kit pour vous en emparer !

Article co-écrit par Anne Faubry et Marion Josserand (Designers Ethiques) et Lorraine de Montenay (Green IT)

Lorraine de Montenay

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