Catégorie : Energie

Smart grid : réseaux domiciliaires ou box ?

Le rapport DETIC a réactivé des interrogations au sujet des réseaux domiciliaires. Doivent-ils être développés spécifiquement en utilisant des technologies dédiées ou plutôt s’appuyer sur les box internet existantes ? Jean-philippe Carisé, fondateur du cabinet de conseil S-Kern tente de répondre à cette question déterminante pour l’avenir des réseaux physiques intelligents (smart grids).

Les box fournissant, au sein du domicile, des raccordements filaires et sans fil (wifi), aux différents équipements voulant avoir accès aux réseaux et aux applications, sont disponibles auprès d’une ½ douzaine d’opérateurs (même Darty en propose). Cette box peut-elle être également utilisée pour les réseaux domiciliaires énergies et fluides (RDE) ?

En théorie, oui et également dans une certaine pratique. Mais est-ce fiable ? Du moins la fiabilité de ce produit grand public est-elle en rapport avec celle attendue par les professionnels ? En l’absence de statistiques sur la fiabilité et la disponibilité de ces équipements, et en particulier sur les accès wifi qu’ils proposent, il semble difficile de baser une télégestion des énergies sur leur usage.

Une box RDE serait donc à concevoir. Quelles doivent être ses particularités ? L’intérêt de cet organe est d’offrir un ou des accès réseaux publiques ou privés extérieurs, fiables et d’autre part des raccordements aux différents types de capteurs énergétiques et fluides. Mais ces raccordements doivent de préférence être sans fil : il est difficilement envisageable d’être obligé de (re)câbler tout un domicile. Ces raccordements ne nécessitent pas du haut débit, mais les distances peuvent être longues. La fiabilité minimum attendue correspond à une disponibilité d’au moins 99% (ou 1/4h d’indisponibilité par jour).

De plus, les industriels comme les opérateurs ou exploitants en énergies ne préféreraient-ils pas des protocoles et systèmes dédiés ? Des standards ont vu le jour, en particulier dans le domaine de la domotique (bas débit, faible puissance et rayonnement) tel que KNX et EIB qui présentent l’avantage d’utiliser tout type de support (du courant porteur au sans fil en passant par la paire torsadée). Reste l’interface avec l’opérateur ou équivalent, à l’extérieur de l’habitat. Une box doit-elle disposer d’une interface KNX ?

Quid des réseaux dédiés
L’empilement des « box » dans un habitat ne parait pas la solution idéale, quoiqu’en termes de disponibilité, fiabilité, sécurité, … une concentration n’est pas non plus la solution. L’intérêt pour le client est dans la disponibilité sur le marché d’offres et d’outils compatibles (issus de fournisseurs différents) et ouvert dans le sens où le nombre de « capteurs » peut évoluer dynamiquement sans avoir à tout reprogrammer ou câbler. La stratégie pour les industriels est dans le développement de KNX et son installation dès leur construction dans les immeubles neufs.

Mais qu’en est-il dans l’ancien ? La stratégie EDF (ou ErDF) est de favoriser un compteur « intelligent », un « smart » compteur pour un smart grid. La smart grid est une des dénominations d’un réseau de distribution d’électricité « intelligent » qui utilise des technologies informatiques de manière à optimiser la production et la distribution et mieux mettre en relation l’offre et la demande entre les producteurs et les consommateurs d’électricité.

ErDF a étudié Linky, qui devrait équiper 35 millions de foyers d’ici 2020 suite à l’accord du gouvernement en septembre dernier. Outre le télé-relevé, Linky permet à l’opérateur de transmettre des « ordres » au compteur chez l’usager (cf. site erdfdistribution.fr) afin d’adapter la production à la demande ou la demande à la production ? Où est son intérêt ? On voit l’intérêt pour l’opérateur mais où est celui des usagers ?

Qui paye quoi ?
Mais cela a-t-il un impact sur la consommation ? Dans la majorité des cas, ces systèmes sont assimilables à des caméras qui filment la consommation au sein de l’habitat. L’exploitant ou l’opérateur doit pouvoir adapter sa production et sa livraison de fluides. Par ces images il obtient des statistiques de consommation, puis ultérieurement il adapte en fonction de paramètres particuliers à ces habitats. Mais peut-il agir à distance sur ces équipements consommateurs pour que ceux-ci s’adaptent à sa production ? Pour l’instant : non. Et c’est bien là le problème.

Qui va payer cette fourniture et installation ? Si on prend le cas des opérateurs télécoms (ex : Orange ou SFR) qui fournissent des box, celles-ci sont déjà payantes. L’offre de nouvelles fonctionnalités ne va-t-elle pas être à l’origine de surcoûts ? Pour ErDF, les règles établies par le gouvernement lors de l’accord pour Linky furent « pas de surcoût pour l’usager » ! Dans les immeubles collectifs, les compteurs sont dans des communs, seul le disjoncteur est dans l’appartement. Est-ce ce disjoncteur qu’il faut rendre intelligent ? Ou bien Linky rend-t-il le disjoncteur « intelligent » ?

Mais si les protocoles et procédures utilisés empruntent le câblage électrique, ce disjoncteur n’est plus qu’un aiguillage. Mais ceci ne peut s’appliquer ni au gaz ni à l’ECS…..

En se limitant dans un premier temps à l’électricité, il apparaît que les box « classique télécom » n’apportent rien et que l’intelligence n’est nécessaire qu’au niveau du compteur – et des capteurs des équipements consommateurs. Il apparaît également qu’une infrastructure support de transmission est disponible par le câblage électrique de l’habitat.

Mais qu’en est-il de la fiabilité de ce support et des équipements permettant une transmission de donnée sur ce câblage ? Ce type d’équipement est appelé modem CPL ou à courant porteur. Il est étudié depuis plus de 20 ans et beaucoup d’informations sont disponibles.

Jean-Philippe