Catégorie : LogicielsCatégorie : Outils

Les NTIC au service des forêts

2011 étant l’année internationale des forêts, ces dernières sont l’objet de toutes les attentions. De nombreux articles s’intéressent à l’impact de la déforestation sur la biodiversité et la lutte contre le changement climatique, surtout depuis le lancement du programme de collaboration des Nations Unies sur la réduction des émissions liées au déboisement et à la dégradation des forêts dans les pays en développement (Programme ONU-REDD).

Dans ce domaine aussi, les NTIC ne sont pas en reste et peuvent apporter des outils d’observation et de mesure pour améliorer la prise de décision et le recueil d’information (IT for Green). D’ores et déjà, de nombreux gouvernements de pays développés utilisent les systèmes d’information géographique (SIG) et la télédétection (en anglais « remote sensing ») pour la gestion de leurs forêts.

En mars dernier, le service américain des forêts ("US Forest Service", USFS) a présenté sa suite logicielle i-Tree pour aider les gestionnaires locaux à identifier et à évaluer les divers services fournis par les écosystèmes forestiers urbains. Parmi elle, I-Tree Design et I-Tree Canopy sont deux applications utilisant les images satellitaires de Google Maps permettant, respectivement, d’évaluer les bénéfices des arbres à proximité des habitations et d’obtenir facilement une estimation statistiquement pertinente de la couverture de différents types de surfaces (forêt, bâti, eau…) au sein d’une zone d’étude définie.

Cependant, les pays les plus touchés par la déforestation sont pour la plupart des pays en développement à qui il manque de nombreux outils d’information et de gestion. C’est dans ce contexte que les NTIC peuvent être le plus utile.

En Amérique du Sud

Un spectromètre pour cartographier la biodiversité de la forêt tropicale

Le Département de l’écologie mondiale de l’Institution Carnegie pour la Science, qui fait partie de l’Université de Stanford (Californie), a lancé le 2 juin 2011 le dernier modèle du Carnegie Airborne Observatory (CAO). Il s’agit d’un système de télédétection et d’analyse transporté à bord d’un avion qui permettra non seulement de cartographier la forêt tropicale, mais aussi de déterminer les différentes espèces d’arbres qui la compose et d’évaluer leurs stocks de carbone.

Grâce à ses capteurs optiques, chimiques et laser, le CAO II créera des images en 3D et en haute résolution de la structure de la végétation. Ces cartes pourront ensuite être utilisées pour détecter de petits changements dans la structure du couvert forestier, notamment la déforestation, la biomasse et la proportion des différentes espèces d’arbres. Très performant, il pourra réaliser un inventaire de près de 4000 m² de forêt tropicale par jour !

Le fonctionnement du CAO II se base sur la détection des propriétés chimiques et spectrales (réflexion de la lumière) des espèces végétales. Pour arriver à ce résultat, l’équipe de l’Université de Stanford a constitué un catalogue rassemblant les propriétés de près de 5000 espèces végétales collectées sur le terrain. Elle a également travaillé avec des ingénieurs du Laboratoire de propulsion à réaction (Jet Propulsion Laboratory) de la NASA pour construire le meilleur spectromètre d’imagerie aéroportée jamais créé, l’Airborne Taxonomic Mapping System (AToMS). C’est cette technologie qui démarque ce modèle des précédents (CAO Alpha et Beta) : ce spectromètre peut mesurer des longueurs d’onde allant d’une portée de 380 à 2510 nm avec une résolution spectrale de 5nm. Cliquez ici pour voir une vidéo montrant comment CAO II voit la forêt amazonienne.

De plus, le CAO II est équipé d’un outil de cartographie du carbone qui s’appuie sur la technologie satellite. Cette fonctionnalité a été intégrée spécifiquement pour contribuer au programme ONU-REDD. Le CAO II pourra donc poursuivre le travail de ses prédécesseurs qui avaient déjà cartographié les stocks et les émissions de carbone d’environ 4,3 millions d’hectares de l’Amazonie péruvienne.

Dans les trois prochains mois, l’équipe va mener des études aériennes et de terrain en Amazonie occidentale (au Pérou et en Colombie) pour évaluer l’impact de la sécheresse catastrophique de 2010. Les résultats de ces travaux aideront les chercheurs à mieux comprendre la forêt amazonienne et son évolution, afin d’agir sur sa gestion et donner des arguments supplémentaires pour sa protection.

Le CAO II devrait également être utilisé en Amérique Centrale, en Afrique de l’Est, à Madagascar et dans l’Asie du Sud-est.

Pour plus d’informations sur le projet « Spectranomics » de l’Institution Carnegie pour la Science, visionnez cette vidéo (en anglais). La portion de la vidéo portant sur le CAO II se trouve entre la 8ème et la 11ème minute.

Les images satellites apportent des preuves pour lutter contre la déforestation illégale

Récemment, des images satellites ont apporté des preuves de déforestation illégale et ont permis de lancer un procès contre les grandes compagnies brésiliennes d’exploitation bovine. Les images ont permis de détecter que 3600 hectares de la forêt du Grand Charco, au Paraguay, avaient été détruits, menaçant l’un des derniers refuges d’un groupe de la tribu autochtone des Ayoreo-Totobiegosode vivant sans contact avec la civilisation.

Suite à cette découverte, une organisation locale de protection des droits des peuples autochtones, le Groupe de Soutien pour les Totobiegosode (GAT), a décidé de porter plainte, aux côtés du Ministère de l’Environnement paraguayen, contre les exploitants brésiliens River Plate et BBC S.A.

Stephen Corry, qui dirige l’organisation Survival International, a déclaré : « grâce aux images satellites, il est pratiquement impossible que des déforestations de grandes ampleurs puissent passer inaperçues, mais les autorités doivent agir avant que les destructions ne se produisent et non après. »

Dans le Bassin du Congo

SPOT 5 Concrétisant l’engagement pris il y a un an lors du sommet de Copenhague de mettre des images satellite françaises au service de la gestion durable des forêts du Bassin du Congo, l’Agence Française du Développement (AFD) a signé un accord avec la division GEO-Information d’Astrium Services, le leader spatial européen. Grâce aux images satellites, on disposera désormais d’un moyen de contrôle et d’inventaire des forêts du deuxième plus grand bassin forestier du monde (après l’Amazonie). Cet accord fait partie d’un projet plus large de cartographie du Bassin du Congo financé par l’AFD et mis en place par un consortium constitué du Centre National d’Etudes Spatiales (CNES), de l’Institut Géographique National (IGN) et de l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD).

Cela intervient dans un contexte où la cartographie et le macro-zonage font beaucoup parler d’eux dans le domaine de la gestion forestière car il existe peu de moyens de suivre l’évolution du couvert forestier et d’évaluer les futurs engagements du sommet de Cancun liés à REDD+. Pour Patrick Le Roch, Directeur d’Astrium GEO-Information Services, « L’imagerie satellite SPOT est la solution idéale pour assurer le suivi du couvert forestier en combinant une capacité de couverture large avec une résolution élevée de 2 m. Nous fournissons les produits, l’expertise et la technologie d’imagerie satellite la plus adaptée au mécanisme REDD+. Ces outils de collecte de données apportent une valeur ajoutée essentielle lors de la phase de mesure et de vérification de l’évolution du couvert forestier indispensable pour les programmes REDD+. »

C’est une très bonne nouvelle pour les pays forestiers africains qui auront à leur disposition plus d’informations, alors même que nombre d’entre eux ont commencé des réformes des régimes fonciers et forestiers. Ces images satellites SPOT seront très utiles pour aider les institutions publiques et la société civile de ces pays à évaluer l’état de leurs forêts, planifier leur exploitation et leur renouvellement. Comme le souligne Dov Zerah, Directeur Général de l’AFD, « grâce à la mise à disposition de ces technologies françaises de haut niveau, nos partenaires dans le Bassin du Congo pourront s’appuyer sur des outils performants pour renforcer leur démarche de gestion durable des forêts. »

— 

Source : 

 

Claire Biason